RODRÍGUEZ, Arsenio TRAVIESO SCULL Ignacio Arsenio, dit: (Güira de Macurijes 1911-Los Angeles 1970)

Ses plus proches ancêtres sont depuis peu à Cuba, amenés directement du Congo comme esclaves. Lorsque Arsenio a sept ans les TRAVIESO partent vivre à Güines. C'est vers cette époque que, frappé par les sabots d'une mule, Arsenio perd la vue.
A la fin de la décennie, tandis que ses frères "Quiqui" et Raúl commencent à montrer leur penchant pour la musique, leur père fait fabriquer un tres pour Arsenio. C'est le facteur de l'instrument, Victor Feliciano, qui lui enseigne les premiers rudiments et Arsenio apprend à une vitesse prodigieuse. Il est également très à son aise avec la basse, les congas, le quinto ou les maracas.

Les traditions africaines sont vivaces dans la famille mais aussi dans l'environnement dans lequel vit Arsenio à Guines. Les descendants d'esclaves constituent l'essentiel de la population et sont tournés vers les traditions et les rites afrocubains, la Rumba et Arsenio dès son plus jeune âge vit à ce rythme. L'oncle SCULL emmène la famille en camion dans les cercles rumberos qui abondent dans la région de Güines, Matanzas. Les jeunes TRAVIESO y apprennent tous les rythmes et les percussions. Les compositions futures de Arsenio laissent penser qu'il a connu les grands rumberos de l'époque, "MALANGA", "MULENCE" et sans doute RONCONA et d'autres.
Mais ils s'initie aussi aux traditions soneras et apprend à jouer de la marimbula, de la botija et devient même un bon joueur de contrebasse.

Le cyclone de 1926 dévaste la ville et détruit la maison des TRAVIESO. La famille émigre à La Havane et s'installe à Marianao où ils sont voisins de Felipe NERI chanteur du "SEXTETO HABANERO" . Arsenio et ses frères "Quiqui" et Raúl, observent les répétitons du groupe. Arsenio estime qu'il est capable de faire avec son tres, mieux que le tresero du sexteto, Carlos GODINEZ et que lui pourrait jouer avec plus de deux tonalités. Déménageant une nouvelle fois, toujours dans Marianao, il habite près d'un autre tresero Issac OVIEDO qu'il fréquente également et qui lui fait connaître Miguel ZABALLA avec qui il apprendra à organiser les voix dans un sexteto.

Dès son arrivée à Marianao Arsenio commencent à jouer avec ses frères, ses cousins et des jeunes du quartier mais aussi quelques amis de Güines, émigrés eux aussi à Mariano ou dans de proches quartiers populaires de La Havane. En 1928 il organise avec ses cousins Estebán REGUEIRA et Jacinto SCULL le "SEPTETO BÓSTON" puis en 1934 il rejoint le "SEPTETO BELLAMAR" du trompettiste José INTERIÁN

Arsenio compose déjà depuis quelques années. "Ya son gangá" date de l'époque du "BÓSTON", "Ven acá Tomás" des premiers moments du "BELLAMAR"... "Bruca Manigua" l'une des plus belles compositions de Arsenio est enregistrée par Miguelito VALDÉS et l'orchestre "CASINO de la PLAYA" en 1937. Arsenio RODRÍGUEZ a aussi l'opportunité de s'intégrer à l'orchestre pour y interpréter son pregón "Se va el caramelero".

En 1940 Estebán REQUEIRA, directeur officiel du "BELLAMAR", offre à Arsenio RODRÍGUEZ la direction du septeto et la possibilité de le transformer. Le tresero fonde alors le "CONJUNTO Arsenio RODRÍGUEZ" auquel il donne une orientation toute particulière et avec lequel il va révolutionner la musique populaire cubaine.


New York 1947. Arsenio, au second rang, sixième à partir de la gauche
avec Pozo -troisième- et les musiciens des Afrocubans.
Photographie: Archives Tumbao. Barcelona.

En 1947 Arsenio, convaincu par ses amis Miguelito VALDÉS et Mario BAUZÁ, décide de consulter un ophtalmologiste à New York. Il pense pouvoir retrouver la vue. Pour réaliser ce voyage il donne de grands concerts à La Havane, à Matanzas, dans sa ville natale Güira de Macurijes. Le public accourt en masse. A New York le médecin est catégorique. Le nerf optique est totalement détruit.

Le désespoir le conduit à se réfugier dans l'écriture. Il compose alors l'exceptionnel bolero "La vida es un sueño". A New York il enregistre avec ses amis et notamment avec "Chano" POZO installé depuis quelques mois dans le Barrio, avec son ancien guitariste Marcelino GUERRA , Panchito RISET et des musiciens de MACHITO dont le conguero Carlos VIDAL. Outre des thèmes de "Chano" il enregistre quelques compositions personnelles dont "Paso en Tampa".

Dans l'avion de retour il compose "Guaguancó en La Habana" se rend à La Tropical où l'attend son orchestre et un immense public. "Lili" réalise immédiatement l'arrangement et Arsenio offre un émouvant concert.


Au début de 1950 Arsenio confie la direction de son conjunto à Félix CHAPPOTÍN et retourne à New York pour s'y installer. Il organise un nouveau conjunto "Arsenio y su CONJUNTO TODOS ESTRELLAS ". Il enregistre immédiatement. Les premières années sont florissantes. Le public se presse pour l'écouter et danser dans les grands clubs de Manhattan. Arsenio fait le va et vient entre la Big Apple et la capitale cubaine mais en 1952 il abandonne la formation cubaine à Félix CHAPOTTÍN et se fixe à New York avec les familles de ses frères "Quiqui" et Raúl. Sa formation américaine est constituée de musiciens latinoaméricains, essentiellement portoricains et de ses deux frères aux percussions mais les musiciens sont forts variables selon les circonstances. Il enregistre de nouveau en 1953 avec René HERNÁNDEZ au piano et avec René SCULL, Cándido Antomattei pour les parties vocales. Parmi les titres figurent "Esclavo Triste", "Mulence", "Yo soy Chambelón", "Oye mi cantar", "Como se goza en el Barrio".... De nouveaux enregistrements sont réalisés en 1955 à New York avec la voix de Luis "Wito" Kortright, Manolo Morales et Cándido Antomattei. A cette époque Arsenio utilise un tres amplifié.


La formation de Arsenio à New York. Photographie Collection J.Jaramillo.

Arsenio retourne à La Havane durant quelques mois en 1956, réorganisant une formation avec quelques anciens membres de son conjunto "Florecita", "Chocolate" ALFONSO, SIRIAL et Estela et de nouveaux musiciens. Il joue à La Havane à La Polar, au Club Social Buena Vista et enregistre avec la voix de sa soeur, d'un chanteur de son groupe américain, Luis "Wito" Kortright et "Wichi" SIRIAL. Pour le dernier enregistrement, sans "Wito", Arsenio a recours à la voix de sa fille Regla.


Le conjunto de 1956 avec Florecita et Estela.

La seconde moitié des années cinquante devient plus complexe. Le mambo, prisé par l'élite newyorkaise et les clubs comme le Palladium, renvoie le Son et les formations qui l'interprètent vers la périphérie, vers les quartiers plus populaires, plus noirs comme Harlem ou le Bronx où existent des clubs tels que le Club Cubano ou le Tropicana Night Club, fréquentés par cubains et portoricains de couleurs et de catégorie sociale moins aisée. Arsenio retrouve les conditions cubaines des années quarante. Il continue toutefois d'enregistrer fréquemment. "El Cumbanchero", "Necesito une mujer cocinera", "Cuba llora", "Quiero mucho a mi suegra"... sont de cette période et l'oportunité lui est donné de retrouver pour ces enregistrements d'anciens partemaires, GUERRA, "Chocolate" ARMENTEROS. En 1962 il utilise les services de Sabu Martínez qui avait remplacé "Chano" POZO après sa disparition dans l'orchestre de Dizzy Gillespie. Sabu, Raúl, "Quiqui" forment un superbe trio de percussions tandis que Arsenio chante dans l'enregistrement du disque "Cumbanchando con Arsenio” .

Cette situation perdure jusqu'en 1964 lorsque Raúl installé l'année précédente à Los Angeles appelle Arsenio et "Quiqui". De nouveau il organise un conjunto qui durant deux années rencontre un franc succès en Californie. Mais de nouveau la situation se dégrade et Arsenio retourne à New York jusqu'en 1969. La musique de Arsenio prend toutefois dans cette période présalsera une tounure plus proche des tendances new yorkaises sans que la situation ne s'améliore nettement. Toutefois il réalise de nouveaux des enregistrments en 1966 et deux ans plus tard "La bamba" , "La pared", "Hang on sloopy", un boogaloo; "Quindembo Jazz"...

 

Arsenio en 1969 pour une jam's avec Tito Puente au Village Vanguard.
Photographie Izzi Sanabria.

En 1969 Arsenio repart pour Los Angeles peut-êre avec le projet de rentrer ensuite à Cuba. Il arme une nouvelle formation avant de s'éteindre à la fin de 1970.

© Patrick Dalmace

Discographie sélectionnée:
* In "Legendary Sessions", L.H. 1948-N.Y.1953, Tumbao TCD 017.
* " Como se goza en el barrio ", N.Y.1953, Tumbao TCD 022.

* Cf. "Arsenio RODRÍGUEZ y su Conjunto "

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